lundi 4 novembre 2013

Sursaut


Combien d'années comme un feu qui s'éteint ?
Demain Novembre sonne
son glas d'habitude
Bienheureux les sourds
qui n'entendent pas encore

Je pense à cette fille
l'automne à sa robe
fuselant
comme le chaume offre la tige

Elle fut précoce
à s'alanguir on dit
que c'est pour ça qu'elle
liseronne
qu'en vain elle fouille les livres
gribouille
tricote anti horaire, ressasse
les choses
(Je crois même qu'elle s'en fait
des mantras
quand dans la glace
Om mani padme hum
elle voit mourir
How many faded homes
le tardillon
How many nights alone...
de son sourire)

Elle ne confie qu'à ceux qui passent
c'est la pudeur des sédentaires
Octobre en fuite
L'envol des grues m'a semblé lourd

Je chausse mes brodequins trempés
Faux voyageur
et faux départ
je bois
toutes les tasses
que mes lacets ont bu

L'envol des grues tombe sur les âmes
comme une toux de clairons
C'est l'annonce

Novembre
spectre en draps noirs
est de retour

Je suis comme elle mais en silence
Le même que vous.
Mais en silence.

Froids depuis si longtemps
la colère ne bout plus
dans le moindre ventre
l'image d'un feu
papier glacé
nuances de gris

C'est tout ce qu'on peut offrir

Ca, et un gouffre
un gouffre où jeter
notre propre gouffre

L'espace des bras
nos bruits raisonnent
jusqu'à se taire
en lassitude

Je ne vois de braises que ce qu'on en trace
des boucles de fusain
en fait
les brûlures du froid

Des mots
Des fantasmes
Un poème

Trois fois rien.

 
 
Milo, Octobre - Novembre 2013

jeudi 23 mai 2013

La Paix

la paix
c'est l'autre qui me parle de la paix putain
la paix vraiment je préfère même la fin de la guerre quand les cris éteints existent encore dans l'écho que
les armes tiédissent et meurent d'une fin sur mesure
quand les ennemis fêtent ensemble leur vie préservée on se propose le feu comme on a pu l'imposer
et ce sourire Jeune homme parle moi encore de l'assaut du jour où -
je crois me souvenir de toi dans une peau de chez nous sous un manteau autre pas différent sinon
passé lui non par les balles mais par le temps et dieu sait maintenant quand -
que nous vivions les mêmes peurs sur des fronts différents larmés de sueur et chaque œil creusé rendait les autres plus vides
tout ça j'en parle comme si j'avais vécu ce -
et fratricide moins qu'intestin
ce -
son issue apaisante apaisante la main sur l'enfant qu'elle porte la paix juste avant qu'il ne fige le gosse repu de caresses et je mens
je simule je m'écœure
tout ça n'était qu'intérieur et la guerre était lâche
mais la mort oui quand même et partout
inquantifiable diffuse
Omniprésente
et l'odeur
ah l'odeur
ne niez pas vous la sentiez
à l'arrière
vous ne disiez rien il n'y avait rien à dire d'ailleurs
je n'en veux à rien j'ai pensé un moment boucher les trous avec de la matière morte et puis
bêtement j'ai fait tomber un truc c'était dans ma poche et ça a poussé dans les trous c'était pas métallique ça n'avait pas d'odeur j'ai dit Il n'y a pas de hasard
alors on continue et ce truc là les gens le sentent le trouvent c'est pas une question de pif après les gens vous collent et ils disent
contre du tabac contre un baiser contre mon âme je dis contre contre contre toujours contre
c'est votre malheur moi je suis pour c'est la souplesse du combattant et nous sommes restés contre
l'un et l'autre c'était chouette comme de la vie quand même alors que ça n'avait rien à voir vraiment c'était juste ses pulsations sous mes os et ce n'était qu'à elle tout ça j'avais aucun droit dessus
elle disait qu'elle et moi c'était grâce à la paix
la paix
quelle audace la paix je te la fous au et je t'aime quand même ma paix rien de tout ça vraiment rien ce n'est pas la paix tu sais c'est
l'accoutumance au grondement de tout mon corps au grondement des avions toi tu es sourde de nature mais tu es stupide et belle comme le coquelicot qui pousse dans les casques tombés alors
si tu as cru a la paix je comprends pourquoi maintenant tu files avec l'erreur entre les dents file file file tant que je gronde encore qui sait ce qui peut te tomber sur la gueule
et quand je ne gronderai plus alors oui ce sera la paix dans dix vingt trente et le coquelicot aura tombé les pétales de toute façon je pourrai plus les sentir ces opportunistes qui squattent
mon casque j'ai la tête criblée d'obus et c'est ta faute je n'avais jamais eu autant de beau sous les doigts depuis que la marque des dents a fait son trou a côté de celle du chien alors oui
la paix la paix la paix j'en veux pas de la paix la paix c'est plein de petits x qui font les barbelés ta paix
la paix c'est quand tout s'arrête et qu'on s'habitue
on s'habitue il faut le faire de s'habituer on est vraiment des cons et
si j'ai tout ça à l'intérieur de moi c'est qu'une partie de ce qui demande de sortir à ça on s'habitue pas rien à voir avec la paix si toi tu l'as tu n'as rien
que des acquis et tout ça c'est mort c'est ça la paix comme si j'avais bouché mes trous avec les morts mais non
je suis vivant et je l'enterre ta paix.
 
Milo, janvier 2013